COVID-19 : nouveau décret “Personnes vulnérables” et analyse du Snudi-FO

Le Ministre de l’Education Nationale était en attente d’un nouveau décret sur les positions administratives des personnels vulnérables : c’est fait. Le décret n°2020-1365 est paru ce 10 novembre suivi de la circulaire d’application « relative à l’identification et aux modalités de prise en
charge des agents publics civils reconnus personnes vulnérables » dans la Fonction Publique en date du 10 novembre également. Force est de constater que le gouvernement a été obligé de prendre en compte l’argumentaire développé par le Conseil d’Etat qui avait invalidé la décision du gouvernement de limiter les possibilités des personnels jusque-là considérés comme vulnérables à l’accès au télétravail ou aux ASA.

Le décret général du 10 novembre 2020

Elles reprennent et adaptent à la fonction publique les dispositions du décret pris pour l’application de l’article 20 de la loi n°2020-473 du 25 avril 2020 de finances rectificatives pour 2020 applicable aux salariés.

Les critères de vulnérabilité sont définis par l’article 1er du décret pris pour l’application de l’article 20 de la loi n°2020-473 du 25 avril 2020 de finances rectificatives pour 2020 :

a) Etre âgé de 65 ans et plus ;
b) Avoir des antécédents (ATCD) cardiovasculaires : hypertension artérielle compliquée (avec complications cardiaques, rénales et vasculo-cérébrales), ATCD d’accident vasculaire cérébral ou de coronaropathie, de chirurgie cardiaque, insuffisance cardiaque stade NYHA III ou IV ;
c) Avoir un diabète non équilibré ou présentant des complications ;
d) Présenter une pathologie chronique respiratoire susceptible de décompenser lors d’une infection virale : (broncho pneumopathie obstructive, asthme sévère, fibrose pulmonaire, syndrome d’apnées du sommeil, mucoviscidose notamment) ;
e) Présenter une insuffisance rénale chronique dialysée ;
f) Etre atteint de cancer évolutif sous traitement (hors hormonothérapie) ;
g) Présenter une obésité (indice de masse corporelle (IMC) > 30 kgm2) ;
h) Etre atteint d’une immunodépression congénitale ou acquise :
– médicamenteuse : chimiothérapie anti cancéreuse, traitement immunosuppresseur, biothérapie et/ou corticothérapie à dose immunosuppressive ;
– infection à VIH non contrôlée ou avec des CD4 < 200/mm3 ;
– consécutive à une greffe d’organe solide ou de cellules souches hématopoïétiques ;
– liée à une hémopathie maligne en cours de traitement ;
i) Etre atteint de cirrhose au stade B du score de Child Pugh au moins ;
j) Présenter un syndrome drépanocytaire majeur ou ayant un antécédent de splénectomie
k) Etre au troisième trimestre de la grossesse ;
l) Etre atteint d’une maladie du motoneurone, d’une myasthénie grave, de sclérose en plaques, de la maladie de Parkinson, de paralysie cérébrale, de quadriplégie ou hémiplégie, d’une tumeur maligne primitive cérébrale, d’une maladie cérébelleuse progressive ou d’une maladie rare.

Il s’agit donc de la liste des pathologies initiales inscrites dans le décret du 5 mai 2020 !

Qui peut bénéficier parmi les personnels vulnérables d’une Autorisation Spéciale d’Absence ?

Le décret stipule qu’il ne suffit pas d’être personnel vulnérable pour prétendre automatiquement à une ASA.
L’article 1, 2° indique qu’il faut que le personnel vulnérable ne puisse pas « recourir totalement au télétravail ni bénéficier des mesures de protection renforcées suivantes :
a) L’isolement du poste de travail, notamment par la mise à disposition d’un bureau individuel ou, à défaut, son aménagement, pour limiter au maximum le risque d’exposition, en particulier par l’adaptation des horaires ou la mise en place de protections matérielles ;
b) Le respect, sur le lieu de travail et en tout lieu fréquenté par la personne à l’occasion de son activité professionnelle, de gestes barrières renforcés : hygiène des mains renforcée, port systématique d’un masque de type chirurgical lorsque la distanciation physique ne peut être respectée ou en milieu clos, avec changement de ce masque au moins toutes les quatre heures et avant ce délai s’il est mouillé ou humide ;
c) L’absence ou la limitation du partage du poste de travail ;
d) Le nettoyage et la désinfection du poste de travail et des surfaces touchées par la personne au moins en début et en fin de poste, en particulier lorsque ce poste est partagé ;
e) Une adaptation des horaires d’arrivée et de départ et des éventuels autres déplacements professionnels, compte tenu des moyens de transport utilisés par la personne, afin d’y éviter les heures d’affluence ;
f) La mise à disposition par l’employeur de masques de type chirurgical en nombre suffisant pour couvrir les trajets entre le domicile et le lieu de travail lorsque la personne recourt à des moyens de transport collectifs. »
Il s’agira donc pour les personnels vulnérables de prendre une par une ces mesures renforcées et faire la preuve de son impossible mise en œuvre.

Par exemple :
– Un professeur du second degré se déplace de classe en classe. Comment est-il possible de mettre en œuvre les mesures a,c et d sauf à garantir au collègue que le ménage (nettoyage du bureau, du tampon, de l’ordinateur… de tout ce qui aura été touché par le collègue précédent) sera fait avant qu’il ne fasse classe ?
Quand bien même ce professeur se verrait attribuer sa propre classe, il aura interdiction de se rendre dans la salle des professeurs ? Il faudra donc revoir son emploi du temps pour que ce collègue ne sente pas psychologiquement isolé.

Un autre détail : sera-t-il possible de lui mettre à disposition des toilettes personnelles ?

– Un enseignant en maternelle et en élémentaire : comment garantir le respect des mesures a, c et d sauf à rester sans bouger à son bureau ?

– Un personnel administratif devra également être protégé, notamment en application des a, b, c et d. Par ailleurs, toutes les missions ne sont pas « télétravaillables », comme par exemple un agent d’accueil, ou certaines fonctions des personnels de gestion dans les EPLE.

Il est à noter que le décret prévoit aussi dans son article 2 la possibilité pour l’agent vulnérable qui serait « en désaccord avec l’employeur sur l’appréciation portée par celui-ci sur la mise en œuvre des mesures de protection renforcées (…) , (de saisir) le médecin du travail qui se prononce en recourant, le cas échéant, à l’équipe pluridisciplinaire de santé au travail. Le salarié est placé en position d’activité partielle dans l’attente de l’avis du médecin du travail. »

Les personnels vulnérables sont depuis le 2 novembre placés en ASA sur la base d’un certificat d’isolement de leur médecin. Si le décret, dans son article 2, indique qu’il est inutile de fournir un nouveau certificat médical, pour autant il appartient à l’agent de faire une demande de placement
en ASA.

A partir de là, il y a deux possibilités :
– « (…) l’employeur estime être dans l’impossibilité d’aménager le poste de façon à protéger suffisamment l’agent, celui-ci est alors placé en autorisation spéciale d’absence (ASA). » (circulaire FP ci-dessus)
– L’administration répond à l’agent qu’il doit retourner sur son poste. Nous invitons donc tous les collègues dans cette situation à contacter le Snudi-FO. Nous nous saisirons ensemble de l’article 2 du nouveau décret : le collègue indique à l’administration qu’il est en désaccord sur l’appréciation que porte l’administration sur la mise en œuvre des mesures de protection et qu’il demande la saisine du médecin de prévention.

La circulaire FP indique que « En attendant cet avis, l’agent est placé en ASA. »

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